« C’est moi qui vous ai choisis, afin que vous alliez, que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure » (Jn 15,16)
A la suite d’une visite le 6 septembre dernier, Mme Nguyễn Ngọc Ánh a révélé que son mari était victime d’actes de harcèlement perpétrés sans relâche par des codétenus- au centre de détention de Binh Phu, dans la province de Ben Tre- sans que les autorités ne réagissent.
Détenu dans la section réservée aux criminels de droit commun, Nguyen Ngoc Anh affirme avoir été battu avec des ustensiles de cuisines, empêché d’accéder à son couchage et constamment insulté. Des codétenus l’ont menacé de mort, prétendant qu’ils ne seraient même pas tenus responsables de son décès. C’est la preuve, selon Nguyen Ngoc Anh, qu’ils bénéficient de la protection de l’administration du centre pénitentiaire. Il a surpris une conversation entre deux codétenus, au cours de laquelle l’un deux affirmait qu’il allait devoir attaquer et tuer Anh pour obéir aux ordres.
Il est courant que des prisonniers de droit commun se voient offrir des réductions de peine en échange d’actes de harcèlement ou de violence à l’encontre de prisonniers politiques afin d’épuiser ces derniers et les forcer à plaider coupable. La police a d’ailleurs confisqué les effets personnels de Nguyen Ngoc Anh et a puni des prisonniers ayant fait preuve de sympathie avec lui.
Nguyen Ngoc Anh est un éleveur de crevettes de 38 ans du Sud du Vietnam. Il avait coutume de partager sur Facebook ses commentaires sur l’actualité des questions sociales, politiques et environnementales. Il a été arrêté le 30 août 2018 puis placé en détention. Le 6 juin 2019, un tribunal provincial l’a condamné à six ans de prison pour ses publications « anti- Etat » en vertu de l’article 117 du Code pénal vietnamien (ex article 88). Plus cinq ans d’assignation à résidence. N’ayant pas bénéficié de représentation légale en première instance, Nguyen Ngoc Anh a engagé un avocat pour préparer son recours en appel. Il n’a pas encore été autorisé à rencontrer son avocat pour préparer sa défense.
Les écrits en ligne de plus en plus criminalisés
En l’absence d’une presse indépendante, et dans un pays où la société civile est bâillonnée, Facebook constitue le dernier espace d’expression libre des Vietnamiens. Les défenseurs des droits humains, mais également les citoyens en général, y commentent l’actualité sociale, environnementale et politique, partagent des livestreams de manifestations ou des photos attestant des brutalités policières. Conscient du potentiel de mobilisation qu’offre la plateforme, le Vietnam a pris des mesures pour en contrôler les contenus. Depuis quelques années, les publications Facebook apparaissent nommément dans les dossiers d’accusation de dissidents et sont utilisées pour délivrer des condamnations iniques. Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur la loi sur la cyber sécurité. Sous couvert de lutte contre la cybercriminalité et au nom de la sécurité nationale, elle porte gravement atteinte à la liberté d’expression en ligne.
Violation de la Convention contre la torture
Il est courant que d’anciens prisonniers d’opinion témoignent d’actes de violence et d’intimidation commis par d’autres détenus, soutenus par les gardiens. Selon les défenseurs des droits humains vietnamiens, ces actes de harcèlement sont commandités par le personnel pénitentiaire afin de renforcer les conditions de stress intense auxquelles sont soumis les dissidents, en violation des textes vietnamiens et internationaux supposés garantir le respect des droits des personnes détenues. Rappelons que la Convention contre la torture, ratifiée par le Vietnam en 2015, interdit tous les « actes constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants [...] commis par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant [...] à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite. »
Régime | République socialiste dirigée par Nguyễn Phú Trọng |
Superficie | 330 967 km 2 |
Population | 92,7 millions hab. |
Capitale | Hanoï |
Peine de Mort | Oui, par injection létale |
Torture | OUI |
Conventions ratifiées | Le Vietnam a ratifié la convention contre la torture de l’ONU et le Pacte relatif aux droits civils et politiques (ICCPR). |